Multipliants les partenariats avec les opérateurs mobiles locaux, les plateformes de streaming tentent de s’implanter en Afrique subsaharienne, dans un marché de plus en plus concurrentiel
L’an passé, Deezer, annonçait un partenariat avec l’opérateur mobile Tigo, pour que celui-ci distribue son catalogue de 35 millions de titres au Ghana, au Tchad, en Tanzanie, en République Démocratique du Congo et au Rwanda. Ce partenariat s’avère mutuellement bénéfique, puisque Deezer a ainsi accès à la base d’utilisateurs de l’opérateur s’élevant à 20 millions de personnes, tandis que l’intégration de Deezer permet à Tigo de construire sa base d’utilisateurs 3G et d’accroitre ses revenus en dehors des forfaits téléphoniques.
Déjà en partenariat depuis 2012 avec Orange pour la Mauritanie et la Cote d’Ivoire et avec Vodacom pour l’Afrique du Sud depuis 2014, Deezer cherche à renforcer sa présence dans un territoire où la 3G, très peu présente jusqu’alors, est désormais en plein essor. Le succès de son implantation devrait alors être concomitant avec la croissance de la 3G dans ces pays.
Or, c’est sans compter sur le fait que le marché des fournisseurs de contenus tels que les plateformes de streaming est de plus en plus concurrentiel en Afrique, et de nombreux services ont fait leur apparition sur ce créneau. Comme nous l’évoquions dans notre dernier article sur l’emergence des technologies, on compte en effet plus de 100 plateformes mobiles et digitales de musique sur le territoire africain, et de nouvelles émergent chaque semaine. Parmi elles, deux ont été lancées en mai 2015 par des startups dans les deux parties francophones du Congo, en République Démocratique du Congo (Congo-Kinshasa) et à Congo-Brazzaville, pour diffuser les crus musicaux du coin – qui ne manquent pas.
La première plateforme, baptisée Litoyi, a été lancée par Kenan Jered Mfoundou au Congo-Brazzaville et met à disposition de ses utilisateurs de la musique sans avoir à la télécharger. Les utilisateurs peuvent également partager leurs morceaux préférés avec leurs amis via les réseaux sociaux et les encourager à aller visiter le site. Cette plateforme se veut également équitable : elle permet non seulement d’accroitre la visibilité des artistes, mais aussi de s’assurer que les auteurs et compositeurs soient rémunérés puisqu’elle travaille étroitement avec le Bureau Congolais des Droits d’Auteurs. Le business model est basé principalement sur la viralité, comme nombre de startups des industries de contenus sans financements. La plateforme travaille aussi sur le lancement d’une application, l’augmentation de ses revenus publicitaires, et un partenariat avec un opérateur mobile local.
La seconde startup, Baziks Entertainment est agée de trois ans et est située de l’autre côté de la rivière qui les sépare, à Kinshasa. Elle a lancé deux plateformes distinctes, baziks-pulse.com et Baziks store, dans l’espoir de transformer le potentiel du marché de la musique digital en une réelle économie. La startup a d’ores et déjà signé des accords avec plusieurs opérateurs mobiles locaux. Elle se situe à la croisée du téléchargement et du streaming : d’un côté elle permet aux artistes de sortir leur musique et d’intéragir avec leur fan base, de l’autre, elle permet aux amateurs de musique de découvrir la nouvelle génération d’artistes. Le rôle de Baziks dans l’émergence d’artistes est assurémment important, puisque de nombreux artistes ont acquis une renommée internationale grâce à elle, tels que Melina Katende, Melody of Love, G.NAX, Machine Record ou Kevin Mengi. Son catalogue recence 110 mille morceaux disponibles en ligne, 50 mille en téléchargement gratuit et le site a déjà attiré plus de 100 mille visiteurs.
Ainsi, si Deezer bénéficie de nombreux partenariats sur divers territoires, la prolifération de nouveaux acteurs nationaux le met dans l’obligation de renforcer son catalogue de contenus locaux pour s’imposer durablement. Or, son partenariat avec l’opérateur Tigo est en cela très intéressant, puisque la maison-mère de ce dernier n’est autre que la société Millicom International Cellular, elle-même en partenariat avec le label digital Africori (notre ami avec lequel nous proposons un panel à SxSW 2016 d’ailleurs votez pour nous!), dans le but d’acquérir et de manager les droits d’artistes, d’auteurs et de micro-labels locaux.
Mais à ses concurrents les plus installés tels que Simfy, Spinlet, Mziiki, Mdundo, s’ajoutent désormais les petites startups du type Litoyi ou Baziks, et chacun compte bien se faire une place au soleil dans ce marché très attractif, poussé par la croissance de la 3G en Afrique.
Et rajoutons à cela l’arrivée d’Universal en Afrique et son installation à Abidjan, qui partagera les locaux de Canal+ à Cocody.