Pourquoi SOPA et PIPA n’aideront pas la musique et les artistes…

Ce post est librement inspiré d’un article du blog Tight Mix Blog écrit par Shane Jones.

Vous avez certainement dû entendre parler de SOPA et PIPA. Et si vous n’en avez pas entendu parler, vous devriez aller vous renseigner très vite. Parce que c’est véritablement important que vous soyez conscient du risque que porte ces deux lois sur les droits, la neutralité et la liberté d’expression sur le net. J’avais d’ailleurs suspendu toutes activités sur mon site le jour du SOPA black out. Vous trouverez deux articles sur mon site plus explicitant sur SOPA et PIPA, ici et ici.

Donc SOPA, the Stop Online Piracy Act est couplé à PIPA Protect IP Act (PIPA). Ces deux projets de loi constituent une menace majeure pour les droits sur le net, la liberté d’expression en censurant tout site qui a commis une violation du droit d’auteur.

En effet, ces deux textes prévoient de faciliter largement le blocage de tous les sites considérés comme portant atteinte aux droits d’auteur. Toute personne jugeant que ses droits ne sont pas respectés pourrait aussi faire bloquer le site en question, par une procédure simplifiée, sans passer par un juge. Alors même que beaucoup de sites font le maximum pour que les droits d’auteur soient respectés.

L’objectif de ces projets de loi est d’empêcher le piratage numérique ainsi que contrôler strictement la diffusion des contenus sur Internet. Alors sur l’intention de limiter le piratage, on n’est d’accord. Pirater c’est pirater, c’est pas partager, et c’est d’abord s’approprier le bien culturel d’autrui. Je pense notamment aux conséquences sur les artistes, et je crois que c’est quand même à eux, avant tout, de choisir ce qu’ils veulent mettre sur Internet, comment et sous quelles formes, et non pas à d’autres à le faire pour eux (et non les artistes ne vivent pas du live toussa blabla).  A ce sujet, deux artistes, le groupe Exsonvaldes et James Murphy s’étaient exprimés sur le site.

Après, est-ce que vouloir stopper le piratage à travers un contrôle radical des contenus est la bonne idée? Je ne pense pas. On le dit sans arrêt, mais il est vraiment nécessaire de faire évoluer rapidement droit d’auteur et business models. Je pense encore ici aux artistes, et nous arrivons véritablement à l’ère de l’artiste entrepreneur (comme l’appelle Giga OM), à savoir l’artiste qui va s’entourer d’une équipe, céder de moins en moins ses droits et gérer, par lui même, son propre business. C’est d’ailleurs le parti pris de l’Agence DBTH qui accompagne et soutient les artistes dans ces choix en leur mettant à disposition tous les outils necessaires (du marketing à la distribution). Ce modèle n’est pas le modèle ultime. C’est une réponse à une évolution actuelle. Et cela ne va pas contre l’industrie. ça l’accompagne…

Pour revenir sur SOPA et PIPA, vu l’opposition généralisée du monde entier des Internets, ces deux projets de loi ont été déclarés «toxiques» et reporté jusqu’à….On a vu d’ailleurs deux mondes emerger dans cette “guerre”. L’industrie culturelle vs l’industrie de l’internet. Des géants comme Google, Facebook ou Wikipédia ont pris officiellement position contre SOPA et PIPA quand Sony s’engageait pour…ce qui lui a valu les foudres des anonymous et la mise en ligne de leur catalogue musical sous forme de d’annuaire (de directory)…

Dans quel monde je suis? No fuckin’ idea. Les fesses entre plein de chaises avec pour objectif de rester debout.

Donc bien que l’intention derrière SOPA / PIPA semble être, à première vue, une bonne intention pour les musiciens,  voici trois exemples (fournis par Shane Jones dans son article sur Tight Mix Blog) qui prouvent juste le contraire:

1. Karmin et YouTube


Le duo Karmin s’est fait connaître en postant un paquet de covers sur Youtube, d’Adèle à LMFAO . Qui dit covers dit aussi pas forcément autorisations et droits. Que se serait il passé pour Karmin et Youtube sous SOPA/PIPA? Et bien Youtube aurait pu fermer (tomber) car il tolérait sur son réseau, une contrefaçon, à savoir une cover non autorisée d’un titre. Et Idem pour Facebook. Vous postez cette cover de facebook sur votre profil? Et bien on peut faire tomber Facebook pour contrefaçon.

Donc clap de fin pour toux ceux qui utilisent des titres, ces morceaux de vidéos, de films, des photos pour se faire connaître et jouer sur la viralité.

2. Les Indie


Bon, quoi qu’on pense d’Internet et de son boulot sur l’emergence d’artistes, la musique indé beneficie quand même vraiment d’une exposition essentielle avec Internet. Et beaucoup d’artistes ou de labels indé utilisent des sites comme Bandcamp, des outils comme Soundcloud pour faire vivre et monétiser leur musique. Les indés ont aussi de moins en moins de distributeurs, de moins en moins de linéaires dans les magasins. Le but de SOPA est quand même de protéger les intérêts des plus gros. Il se passe quoi quand les sites permettant la découverte d’artistes seront tombés? Quand les sites permettant la distribution d’autres artistes seront tombés? Un Bandcamp qui laisse un artiste utiliser sa technologie pour permettre le telechargement gratuit d’une cover par exemple peut tomber. On laisse tout le monde dans l’anonymat?

3. Partager


La musique est une activité intrinsèquement sociale. Nous voulons tous que nos amis puissent écouter le dernier artiste ou la dernière chanson que nous venons de découvrir. Donc naturellement, on prête les CD, on envoie des liens Spotify, on balance des tweets, on poste des vidéos Youtube sur les murs Facebook ou sur nos blogs. Par exemple, toutes les semaines, sur mon site, Re/Ec poste une vidéo Youtube d’un artiste qu’il a découvert et dont il aime la vidéo.

Et à partir des recommandations de nos amis, on peut tomber amoureux d’un artiste, d’un groupe, le suivre, l’acheter, aller en concert. Je bénirai toute ma vie le monsieur qui m’a fait découvrir les Blacks Keys et LCD SoundSystem il y a 10 ans.

Mais sans la possibilité de partager facilement de la musique sur le web, et même par des moyens légaux, l’industrie de la musique ne continuerait elle pas à se tirer des balles dans le pied (voire le genou?).

Comme le disait Simon des Exsonvaldes “Il faut définir ce qu’on entend par piratage. Quelqu’un qui télécharge notre disque sur un blog, pour découvrir notre groupe, n’est pas un pirate. C’est un curieux. On fait la même chose. S’il aime, on espère qu’il aura envie d’acheter le disque, ou nos disques précédents, ou de nous soutenir en venant à un concert, en parlant de nous autour de lui. Mais il doit avoir à l’esprit que ce qu’il a téléchargé a nécessité des coûts de production importants, et que c’est grâce à son soutien qu’on pourra faire le disque suivant. C’est cette relation de confiance, précieuse, que nous essayons d’instaurer avec notre public.”

Personnellement, je n’achète plus de musique sans l’avoir écoutée (bon sauf les Black Keys et LCD Sound System. Mais ça c’est une autre histoire). Alors on pourra m’opposer les Black Keys justement ou Coldplay qui ont décidé de ne rien mettre sur les plates formes de streaming avant la sortie de leurs albums respectifs. Ou que Paul Mac Cartney quitte Spotify. Oui mais eux c’est eux. Et il y des contres exemples dans les deux cas. Prenons Lana Del Rey qui a des scores enormes de ventes d’albums alors que ses clips tournent dur Youtube depuis juin 2011.

Les plates formes de musique en ligne comme Bandcamp et SoundCloud sont essentielles pour découvrir de la musique, la partager, échanger, et éventuellement vendre…Les faire tomber n’aiderait pas la musique…

Vouloir exercer un contrôle aussi radical peut être nuisible pour les sites, pour la connaissance et l’information en générale. Demain, des blogs, des sites de musique, mon site,  pourraient devoir répondre à toute sorte d’attaques. D’une façon générale, beaucoup de sites pourraient être amenés à disparaitre. D’autres ne verraient jamais le jour, découragés par ces lois. Comme le dit très bien Lucien de Baixo, c’est le web qui s’attaque au net.

L’innovation est la solution au piratage. Pas la législation.

Ce post est librement inspiré d’un article du blog Tight Mix Blog écrit par Shane Jones.

Illustration photo: “We want more”


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About Virginie Berger

Virginie Berger est la fondatrice de DBTH (www.dbth.fr), agence spécialisée en stratégie et business développement notamment international pour les industries créatives (musique, TV, ciné, gastronomie), et les startups creative-tech. Elle est aussi l'auteur du livre sur "Musique et stratégies numériques" publié à l'Irma. Sur twitter: @virberg

3 comments

J’apprécie beaucoup ton blog, qui nourrit très positivement la réflexion sur bien des axes.

Permets-moi de souligner que tu oublies dans ton article de préciser que sous couvert de protéger l’Art (cette bonne blague), les lois “anti-piratage” donnent surtout à l’état et à des entreprises privées le pouvoir de couper sans préavis et sans jugement un site internet.

On parle là clairement de contrôle d’internet et de censure, plus ou moins habilement maquillés. Ce pourquoi ces lois sont extrêmement dangereuses.

Que l’on tente d’instaurer des lois liberticides au nom de l’Art est à vomir.

Je vais me faire l’avocat du diable.
Bien sûr, la fermeture de sites comme youtube et consorts ne serait pas nécessairement la solution. Mais en attendant, crier que SOPA et PIPA sont des projets liberticides qui mettent en péril l’industrie de la musique en empêchant le partage est une bêtise. Certes, nous sommes en 2012, certes les gens sont devenus de vastes assistés incapables de se bouger le cul. Mais merde quoi, avant internet, on faisait comment??? Et qu’on ne vienne pas me dire que GRACE à internet, l’industrie de la musique se porte mieux, que la pub se fait mieux etc… Car c’est faux!! Les cds ne se vendent plus, les concerts sont désertés (sauf gros festivals… Mais en l’occurence, les gens ne s’y déplacent plus pour les groupes mais uniquement pour faire une teuf géante sur 3 jours -faudra d’ailleurs qu’on m’explique l’utilité de PAYER une entrée pour PAYER la boisson pour faire la fête… m’enfin…) etc…

Bref, je ne sais pas si SOPA et PIPA SONT les solutions, mais c’est au moins une TENTATIVE de faire avancer les choses. Et quand on me parle de “loi liberticide”, j’aurais envie de dire: “c’est quoi de voler le travail d’autrui?? c’est pas liberticide??”!! Bref, qu’on débate sur des lois qui paraissent bizarres, ok. Mais il va être grand temps d’ouvrir les yeux!! Internet est un OUTIL et pas une FIN EN SOIT!! Les différentes industries se portaient très bien avant son apparition, merci pour elles. Maintenant, rien ne va plus (ah si… Les industries de la télécommunication vont très bien elles…)!!

Voilà, c’était mon coup de gueule, je n’ai rien d’un capitaliste, bien au contraire. Je suis juste un anar enfermé dans un monde capitalo qui me gonfle. Partant de là, je fais de mon mieux pour essayer de voir une logique quelque part, et en l’occurence, permettre le vol pur et simple d’oeuvres quand on punit le vol de toute autre chose, c’est simplement illogique. Alors quitte à gueuler, autant gueuler pour les bonnes raisons: si on VEUT la gratuité de la culture, alors exigeons la gratuité du reste. Et si on ferme sa gueule fasse à la gratuité du reste, alors qu’on arrête de gueuler sur la non gratuité de la culture. A bon entendeur.

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