“Un label meurt toutes les 30 secondes” Laissons 1 mn de plus à Jarring Effects

Comme beaucoup de gens, je connaissais Jarring Effects de nom. Label lyonnais, dub et  electro dub, associatif, communautaire et militant. Un de ces labels qui a réussi à se construire une véritable image. Gage de qualité pour ceux qui aiment leur musique. Un label comme on aimerait en voir plus souvent.

Et puis lors de mon intervention sur les conférences organisées par la FEPPRA, j’ai pu rencontrer Monsieur Mo, le patron, reconnaissable entre mille, du label. Qui ne cache pas qu’il ne sait pas comment il va passer l’hiver….

Jarring Effects est né en 1993 d’un studio de répétition situé sur la Croix Rousse à Lyon. A force de répéter dans ce local, Mei Tei Shô, Crazy Skankers et High Tone ont crée une association pour organiser des concerts. Puis en 98, ils ont trouvé un distributeur, Pias,  et ont alors sorti une compilation des artistes qui répétaient dans les locaux du label, puis le premier maxi de High Tone en 1998.

Depuis, les activités se sont multipliées et Jarring Effects s’est scindé en deux entités. Jarring Effects Label qui gère l’activité de production, et Jarring Effects Association qui quant à elle gère la partie événementielle (concerts, le festival Riddim Collision) mais aussi le studio d’enregistrement.

Jarring Effects, c’est aussi un fanzine, Nuke, tiré à 30 000 exemplaires, une équipe de 10 personnes, mais pas que. C’est aussi 90 références, 30 artistes dans le catalogue, 300 000 disques vendus en 15 ans, un studio, un festival (Ridim Collision) et un vrai militantisme. Ils ont par exemple organisé un festival en Bosnie quelques années après la fin de la guerre civile.

Sauf qu’après 15 années d’activisme au compteur, Jarring se demande bien comment ça va se finir…

La crise est passée par eux. Monsieur Mo explique qu’entre 2005 et 2010, la vente de disques a chuté de 50%. Mais pas que. Jarring Effects a dû faire face à un procès face à Pias, son ex-distributeur de disques. Et puis Jarring Effects paie aussi sa culture du coup de main. Chacun peut en effet passer dans les bureaux, utiliser de dont il a besoin, bureaux, telephones, internet et même des gens du label. C’est top, c’est généreux, mais ça coûte. De l’argent et du temps…En me ramenant à la gare, Monsieur Mo me disait dans la voiture

« Maintenant, poser son cul sur une chaise dans les bureaux de Jarring Effects, ça a un coût”.

Et ça lui fait pas plaisir de dire ça, Monsieur Mo.

Pendant des années, ils n’ont pas compté. Attention, pas compter ne veut pas dire ne pas faire attention aux comptes, mais pas compter dans le sens « on fait le max, on se débrouille entre nous après ». Par exemple, ils ne sont pas tourneurs de leurs propres artistes. Ils n’en sont même pas éditeurs. “Mais aussi parce que” me disait Monsieur Mo, “les artistes eux-mêmes ne sont pas interressés par ce type de calcul.”

Sauf que là, on est dans l’urgence. Alors que les albums d’High Tone atteignaient 25 000 exemplaires, le dernier a fini à 8000. Ce qui n’aide pas…Ez3kiel, leur groupe phare ne suffit pas non plus.

Aujourd’hui Jarring est en déficit. Avec huissiers, menaces de dépôt de bilan, tout….. Mais Jarring ne veut pas le déposer. Tenir coûte que coûte.

Monsieur Mo réfléchit à un appel aux dons par les fans. Un appel aux dons mondial ! Et puis vendre du merch de manière différente. Bref, tout ça, Monsieur Mo viendra vous en parler. Dans pas longtemps.

« Un label meurt toutes les 30 secondes » disait Lefsetz de manière ironique. Ça serait dommage de laisser mourir Jarring Effects.

Plus d’info :
http://www.cd1d.com
http://www.jarringeffects.net

Illustration photo “We want more”

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About Virginie Berger

Virginie Berger est la fondatrice de DBTH (www.dbth.fr), agence spécialisée en stratégie et business développement notamment international pour les industries créatives (musique, TV, ciné, gastronomie), et les startups creative-tech. Elle est aussi l'auteur du livre sur "Musique et stratégies numériques" publié à l'Irma. Sur twitter: @virberg

21 comments

C’est clair, ne surtout, surtout, surtout pas laisser Jarring Effects déposer, ce serait une catastrophe…

in Jarring Effect we trust.
Le plus dur reste à faire pour ce label.
(sans dec, Virginie, t’es monté dans le bus Jarring Effect ? la classe)

pourquoi pas une soirée / tournée de soutien au label avec les artistes historiques ou précurseurs ? je pense que c’est lors de ce type d’événement que les fans de Jarring pourront exprimer leur “support” au label. Malheureusement on sait que faire des sous avec les ventes de disques (même sur le net) devient assez compliqué… mais il est impossible de pirater l’ambiance et la prestation d’artistes lors d’une soirée ou d’un concert !!

Soirée de soutien à Jarring Effects, Sam 19 Mars 2010/ Bordeaux / Rocher de Palmer, avec High Tone, Ez3kiel Vs Hint, Dub Addict Sound, Led Piperz, Senbeï, Dino, Dub Machinist & more….

Merde calice… Me sens mal. Jarring est un ami que nous avons abandonné lors de notre propre dépôt de bilan au Québec (LOCAL Distribution – ne cherchez plus sur le web…). On fait quoi? Ouvrez votre profil sur http://www.cd1d.com et achetez-vous pour un putain de 20 Euros de High Tone ou eZekiel plutôt que de regarder le train passer, ruminants!! Vous attendez que les Ogres viennent aussi vous faire à bouffer?

Bonjour, et c’est bien d’avoir écrit cet article. Nous sommes aussi un petit label indépendant qui traverse de fortes turbulences et il n’y a plus de ceinture de sécurité dans l’appareil. Deux hublots de pétés et…..AAAAAAAAHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHH

Le don c’est bien mais il doit y avoir moyen de booster la vente de CD… J’achete plein de CD quand je passe en France. J’aime beaucoup la solution du 1 euros par mois… a creuser!!
Malheureusement la creativite est respectee nulle part. Je suis aux US et je galere avec mon propre label. Ridicule! Le monde ne veut pas changer, mais c’est a chacun d’entre nous de le changer; c’est ce que j’ai envoye a mes fans/clients. On verra les reponses?!?
En tout cas, JFX je supporte; dites moi ce que je peux faire! J’en parle a tout le monde et je les guide au site!

Moi ça m’intéresserait d’avoir les réponses de tes clients/fans. Tiens moi au courant, je serai curieuse de savoir ce qu’ils en pensent.
Sur Jarring, j’avais ensuite écrit un autre article
http://virginieberger.com/2010/12/jarring-effects-cest-comme-jack-bauer-ils-ne-peuvent-pas-mourir-si-vous-etes-la/ dans lequel je parle des solutions qu’ils mettent en place, notamment autour de package CD.
La semaine prochaine, je publierai un autre article où ils expliquent où ils en sont maintenant, après 15 ans d’activisme.

A l’heure de la chute des ventes de la musique sous forme physique (et sous toutes ses formes en général !), il semblerait que les occasions de faire rentrer de l’argent dans une structure comme JFX, dont l’économie fonctionne avant tout dans leur relation avec un public (vente de cd’s, merch, concerts…bref du tangible) soient de plus en plus rares. Ce qui m’amène à me demander pourquoi ils n’ont jamais versé dans l’édition histoire de générer et ramener du droit, en plus de leurs activités traditionnelles ?

C’est même un peu plus qu’un label Jarring, les concerts organisés par ces gens là sont une ouverture au nouvelles musiques, pas que Dub d’ailleurs.
Et en France, quelque chose de neuf, musicalement, c’est pas tout les jours.

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